
Algérie - C’est bien entendu un non-sens mais Je voudrais tellement que ce soit possible. L’importation, on sait faire ! Il suffirait ainsi de choisir les pays dont les modèles de vie et de société correspondent à nos attentes ; on fait un cahier des charges, on lance un appel d’offres, on sert la ceinture pour réunir le montant nécessaire par ces temps de crise, et le tour est joué : en deux années, au plus, tout serait réglé.
Le titre de cette contribution remonte à une discussion que j’ai eu avec mon ami Maamar (Décédé depuis, qu’il repose en paix) en 1989 ; une époque où le mot changement était sur toutes les lèvres. Douze mois après les événements d’octobre, et au cours d’une discussion, j’avais fait noter que le changement tant promis et attendu mettait du temps à investir notre quotidien. Sa réponse fût une question ‘’ as-tu changé, toi, quelque chose dans tes habitudes ? J’avais répondu que non car je vis de mon salaire et que je considère, de bonne foi, que je mouille suffisamment le maillot pour ne pas avoir à changer. ‘’Il y’a 26 millions d’algériens qui pensent, à tort ou à raison, qu’ils n’ont rien à changer et que le changement doit venir des autres. Ce sera donc le statu quo et malheureusement on ne peut pas importer le changement’. Ainsi fût sa réponse.
Les plus de 35ans se rappellent la suite; on a eu l’ouverture de l’espace politique, le HCE, le CNT, les DEC avant de rentrer dans les luttes fratricides de la décennie noire qui a fait vaciller les fondements même de l’état. On s’en est sorti sans tirer les bonnes leçons. Les martyrs furent oubliés et les appétits se sont aiguisés dans le paysage d’un multipartisme de façade ou la majorité des élus n’avait d’autres ambitions que de pousser le FLN à la porte pour s’y substituer : devenir ‘’calife à la place du calife ‘’ (commeiznogoud) sans prise en compte des intérêts du peuple.
Certains écrits retiennent pourtant que la plus bénéfique des guerres pour un peuple c’est ‘’sa guerre civile’’, elle apprend aux uns et aux autres que ce qui les unit, ce sont les lois qu’ils se donnent avec l’engagement de les respecter et de les appliquer à tous. On est passé à côté de ce seul acquis qui aurait pu donner un sens au sacrifie de tant d’innocents. Des lois votées dans l’urgence sont restées lettre morte faute de textes d’application ou par choix des décideurs. De simples circulaires ministérielles gèlent ou détournent des dispositions de textes législatifs. Tout ceci avec la démission, quand ce n’est pas avec la bénédiction, des personnes les plus touchées. Chacun cherchait sa ligne de privilèges au détriment du comportement citoyen et ne condamne , à voix basse et sans conviction, que les privilèges qui ne lui profitent pas. A ce jeu, ce sont ceux qui sont aux commandesqui, ayant les coudées franches et avec bonne conscience,sont devenus de plus en plus voraces.
‘’Les privilèges sont contagieux et finissent par être considérés par ceux qui les détiennent comme étant des droits irréversibles et légitimes ‘’. La course est ainsi ouverte avec la complicité silencieuse de tous. Le sursaut citoyen du 22 février est venu mettre le holà à des dépassements devenus indécents et inimaginables par ceux-là même qui étaient dans le cercle.
Le Hirak a ainsi démarré pour plusieurs mois selon la même forme : on fraternise le vendredi, on se repose le samedi et on reprend nos vieilles pratiques et habitudes dès la matinée du dimanche. Il aurait été plus souhaitable, et plus porteur, que le sentiment de fraternité et de citoyenneté affiché chaque vendredi se retrouve dans tous les espaces publics (hôpitaux, administrations, les transports, …) pour rapprocher encore plus les enfants de cette terre d’Algérie qui appartient à tous et qui exige des sacrifices de tous.
Les habitudes ont malheureusement la peau dure. On ne peut pas recouvrir en quelques jours ce qu’on a perdu à petites doses durant plus de 40 ans d’immobilisme, de crises et d’hésitations. Le changement sera un processus long et lent ;il appelle à un maximum de vigilance citoyenne. Elire un président, quel qu’il soit, et lui faire porter seul la responsabilité de cette reconstruction citoyenne serait une erreur. Ceci me fait venir à l’esprit une réponse de Churchill à un proche qui lui posait la question si c’était la fin de la guerre après l’arrêt des bombardements de Londres.‘’ ce n’est pas la fin de la guerre, ce n’est même pas le début de la fin, ce n’est que la fin du commencement’’. Dans la même ligne de pensée : l’élection d’un président ne serait que la fin du commencement du retour à une vie démocratique. La poursuite du changement incombe à tous et doit se traduire dans nos faits et gestes de tous les jours. C’est un projet de toute la nation et on doit le porter : on ne peut pas l’importer ni en sous-traiter la responsabilité. Les élus ne seraient que les instruments de la volonté populaire et n’auraient d’autre choix ou d’ambition que de la porter quand elle s’exprime de manière audible et unanime.
Docteur Ali Yousnadj,
Membre du conseil national de la recherche et du développement technologique.
Bonjour Monsieur Yousnedj
Je fais écho à votre contribution avec cet extrait d’une réflexion plus large sur le changement : « Cela fait des siècles et des millénaires que des analyses et des ouvrages de résistance dénoncent la dictature et les dangers des pouvoirs mystificateurs et expliquent comment s’en libérer. Ce sont des pouvoirs de qualités identiques qui dirigent encore le monde aujourd’hui. Les esprits sains ne prennent pas le pouvoir ; à moins que le pouvoir ne modifie les perceptions … Peut-être que l’exercice d’un pouvoir sain n’est pas réalisable parce qu’il nécessite une droiture dont les personnes qui convoitent le pouvoir sont dépourvues. Avides de puissance, les esprits dont l’objectif est de parvenir au pouvoir en paient le pris élevé en termes de moyens : concupiscence, marchandages, clanisme, subornation, assassinats, faux en tout …
Pour que les stratégies de pouvoir se purifient des vices habituels, il faudrait que les citoyens cessent d’être, du fait de leur éloignement du champ politique, les premiers consommateurs des produits du « progrès », et le carburant essentiel des systèmes de dominations. Un carburant bon marché, disponible sans conditions, renouvelable à volonté. Et pas de robinet d’arrêt. Et pas de clauses de rupture parce qu’il n’y a pas de contrat. En même temps qu’ils sont la composante majoritaire de la société, ils sont les victimes « bénévoles » des systèmes qui déstructurent les consciences. Un cycle vicieux fermé. Comment rendre possible un changement de paradigme quand les personnes conscientes de cette anomalie (la nature est exempte de telles discordances entre des ressources disponibles et l’usage qui en est fait par des êtres naturels (animaux et plantes)) échangent entre communautés éparpillées, isolées sur le terrain ? Pourtant, rien n’est impossible.
Il faudrait pouvoir commencer au commencement : offrir aux jeunes enfants des services assurés par des adultes conscients des réalités du monde contemporain et des dangers qu’il recèle pour eux-mêmes et pour l’humanité. Des encadrants sensibilisés à une santé morale ; à la qualité humaine de leurs personnes et de leurs fonctions.
Ces référents seraient un modèle vivant d’intégrité ; une source d’inspiration morale. A tout âge et en toutes circonstances, en particulier auprès de jeunes en confrontation passive ou déclarée avec l’autorité, ce que l’on qualifie improprement d’échec scolaire et délinquance. Entre les deux, la déprime. Et l’immolation volontaire en dernier recours contre le désespoir depuis peu !! Aucune explication, aucune rhétorique, aucune sanction, promesse ou récompense ne peut réaliser ce qu’une seule personne juste peut réaliser comme miracle en termes d’éducation. Essayons d’imaginer le nombre de jeunes qui subissent le tempérament de combien d’adultes inconscients de leur tempérament mais convaincus d’avoir raison, de mieux savoir pour les autres en général, et confions-les à des adultes conscients de leur mode de fonctionnement, capables de questionner leur procédés et de croire que les autres, en particulier les jeunes, peuvent aussi savoir ce dont ils ont besoin. S’ils y sont aidés … Reste le talon d’Achille de cette théorie : le système qui prévaut ne peut pas développer ce genre de service … «
en fin de compte, je penses avoir raison de l’avoir dit une fois il y a quelques jours et je le répète, nous avons besoins d’un pouvoir qui devrait exercer une dictature controlée, au moins durant 2 ans, pour qu’il y ait vraiment un bon départ vers la prospérité pour tous et par tous.